Lettres à mon Professeur de Lettres
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"Ainsi commença l'Histoire, son histoire, et la mienne, dans cette Salle d'où partaient toutes les Lettres, car sans lettres point d'histoire et sans histoire point de lettres…

Lettre d'Avril 2018 - Lettre de la Première Jeunesse

4/1/2018

1 Commentaire

 
Madame, 
    La lourdeur de l’Hiver touche enfin à son terme, et le Printemps gronde à l’horizon, sublime. Sans doute serez-vous surprise de recevoir deux avions de suite, en si peu de temps, mais je ne pouvais attendre la fin de Vénus, mon mois de naissance. Avril est dans l’année cette porte qui clôt le froid et s’ouvre en grand sur le Soleil, une vitre béante, plus large que tous les carreaux de la Salle de Classe, d’où pointe la promesse de l’Été. Je suis né le sixième jour de cette charnière temporelle, et chaque année passant je l’apprécie d’avantage, car comme le premier souffle relance la verdeur, je m’élance dans un nouvel âge en ayant le temps de faire mes adieux au passé, et d’accueillir le présent de l’avenir.
    Madame, dans six jours j’aurais vingt ans.
    Vingt ans. Ma première jeunesse, ma deuxième décimale, ma troisième décennie !
    Enfin, son prélude, et c’est pourquoi j’accours à vous d’instinct, car avant que ne vienne cette nouvelle aube, il me faut prendre à témoin votre silence pour dire saluer
    qui je fus,
    qui je suis,
    qui je serais,
    Et pour m’adresser au trois, quoi de mieux que la lettre ? Que ce grand art que me transmis mon aïeule ? Commençons alors par 1998, en Amérique du Nord, dans la capitale d’un grand pays. Un enfant naquit, d’un couple heureux, avec bientôt un petit frère, trois grands-parents, tous descendants d’Européens.
    L’Enfance fut belle, un privilège qui n’est pas donné à tous. L’Enfance fut trois maisons, trois déménagements, des cartons, des sacs, des boîtes, un chat, trois poissons, deux hamsters, un chien blanc comme neige, des perruches, deux voitures. Et une ville, immense, une nation, ancienne, de loin, toujours de loin, à distance, murs de tous côtés, une vitre pour séparer, pour protéger, toujours une voiture, jamais un camion, jamais de petits petons marchant sur le bêton. Des murs, des chambres, des salons, des canapés, des fenêtres, des berceaux puis des lits, des étagères remplies de livres, des lampes, un piano noir, une table vernie et des peintures indigènes, au Ciel de savoir d’où elles venaient. L’Enfance fut trois maisons, maison de jeune couple, maison de jeunes parents, maison de famille, grande, vaste, trois étages, en brique et bêton, façade jaune, et quelques pâtés plus loin, maison de grands-parents, ancestrale, intemporelles, murs en pierre noire, brute, un jardin comme une forêt, puis à l’autre bout de la ville, encore une maison de grands-parents, titanesque, un manoir, une vallée à côté, un chemin pavé de pierres où l’enfant s’ensanglanta les genoux à huit ans et s’arracha la peau du front ; maisons d’oncles, maisons de tantes, maisons de cousins, maisons d’amis. Un lycée, l’Agence pour l’Éducation Française à l’Étranger qui s’affaissait nonchalamment sur tout un pâté de maisons, étrangers et autochtones mélangés, avec nous entre eux, nous hors d’eux, les biculturels, les bilingues, les bâtards.
    L’Enfant était de ces bâtards. En digne rejeton du Bélier, il courrait dans toute la maison, petite boule nerveuse de dynamisme compulsif, grande gueule à cinq ans, chahuteur inné, polyvalent, débrouillard, inventif, curieux, touche à tout, “touche pas ça”, “j’ai touché”… sourire. Ce qui lui plaisait, il fonçait pour l’obtenir et forçait toutes les barrières, tous les obstacles, il dérangeait le Ciel, la Terre, les Monts, les Vaux et les Morts de tous les siècles en hurlant jusqu’à faire taire le tonnerre ; il en ressortait vainqueur, sauf lorsqu’il s’agissait des murs des maisons. Non, ne jamais sortir des maisons, toujours à l’intérieur, enfermé, se claquemurer dans une sécurité provisoire, se blottir dans des couettes, contre un écran, un poste de télévision, un ordinateur, des livres. Tant de livres. Des livres dodus, des pages fraîches, tournées par des mains de grand-mère, des histoires, des contes, des légendes, une autre langue, une autre nation. Des racines, des origines, une Matrie ! Trois couleurs dont il tartinait son pain au petit déjeuner, chaque matin, et dont on n’oublie pas le goût… L’Enfant se passionna de Sciences, d’Arts, de livres, il joua au scientifique, il joua à l’artiste, il joua, sans jamais sortir, et chaque année passant, les murs se resserraient. Il bâtit les siens, s’ostracisa par choix, se réfugia dans les bibliothèques où les couvertures fermaient les conversations des autres. À l’appel des mots, petit à petit, il pencha tant la tête dans les ouvrages qu’il s’enfonça dans l’univers lettré et s’y fit une petite place, de plus en plus petite, toujours plus petite, parce qu’il ne fallait pas déranger, ne pas s’exprimer, ne pas dire, ne pas faire, ne pas fâcher, s’excuser, faire le doux, faire le gentil, faire le timide, faire les devoirs, répondre aux questions, lire, lire encore, lire plus. Des pages tournées par des mains de grand-mère. Dès dix ans, le Bélier ne courrait plus, ne criait plus, pas de chahut, pas de bruit, pas d’excès, pas de coups de tête, pas de caprices, pas de larmes, j’ignore ce qui se passa, mais tout fut mis à l’enclot.
    Madame, dans trois jours j’aurais vingt ans. 
    C’est à quatorze ans que quelque chose vint chambouler cet équilibre étouffant. Une déflagration retentit dans toute la ville, une poussée fit tomber tous les murs, les livres volèrent en éclats, l’école s’ébranla jusqu’à ses fondations et les maisons tremblèrent !
On part.
Où ça ?
Canada.
    Ni plus ni moins. Vendue la maison ! Pliés les bagages ! 
Le chat dans sa cage, adieu école, parents, cousins, oncles, tantes, amis, livres, ville et grand pays ! 
Cinq heures de vol, la peur au ventre, mais une peur enthousiaste, une envie pressante de ficher le camp et de ne jamais revenir, de sortir, de marcher, de courir, oui ! Courir au loin, à pleins poumons, courir à cœur joie ! 
Mais avant, il fallut traverser l’Adolescence, et si elle fut belle à son tour, elle n’en fut pas moins longue, pénible et ardue, comme beaucoup d’adolescences. 
Le Garçon se chercha, longtemps il chercha.
Timide, réservé, asocial, il continua de se terrer au fond des livres et des bibliothèques, entre les vitres de votre Salle de Classe. Honteux de toute chose, il rougissait au moindre soubresaut de l’esprit jusqu’à faire foncer ses taches de rousseur ; gauche, tant dans le corps que dans les manières, bredouillant ses amitiés, bavant sur ses amoures, clignotant des yeux à la moindre boutade. Chaque bourde l’énervant d’avantage, il ravalait sa colère et ses fautes au point de faire des indigestions. Il renia corps et cœur, tandis qu’il se donnait esprit et âme à l’érudition en travailleur assidu, trop assidu même, au point de s’user les doigts, et les yeux, d’effriter sa cervelle à tant la frotter aux livres. Allergique aux Salles de Sport, il s’assimila aux Salles de Classe, étudia toutes les leçons, répondit à toutes les questions, pour ne pas fâcher, ne pas dire, ne pas faire, s’excuser, faire le doux, faire le gentil, faire le timide, faire les devoirs, répondre aux questions, et lire, lire encore, lire plus. Des pages tournées par des mains de grand-mère.
    À seize ans vint une nouvelle déflagration, la première d’une longue suite qui dura tant qu’il n’apprenait pas LA leçon. 
Cela se fit à seize ans. 
Ce fut long et bref, tout à la fois, un battement de cœur pris entre deux portes de casiers, le profil d’un garçon, un beau garçon, beau, garçon + garçon = … 
Pour comprendre il revint aux livres. 
Il gratta toutes les bibliothèques, toutes les pages, il gratta l’Internet, il gratta dans les films, il creusa toutes les histoires et tous les contes jusqu’à briser ses doigts, et, l’esprit barbouillé d’un arc-en-ciel de larmes ensanglantées, il comprit. Un éclair de lucidité le transperça de part en part et déchira TOUT sur son passage et lui fit saigner tous les doutes possibles : 
Amoures ?     Sexes ?         Genres ? 
Amitiés ?     Parents ?         Familles ?         Langues ? Cultures ?             Patries ?         Drapeaux ?     Continents ? 
Et sa confiance, déjà basse, n’en fut minée que davantage. 
    À dix-sept ans il reprit le chemin, et se cassa la gueule à maintes reprises, car votre remplaçante, la Vie, n’a point la main leste, et elle est aussi fine d’esprit que cruelle dans ses leçons. Il se planta, une, et deux, et trois, et cent fois, par connerie, par emportement, par égoïsme, par naïveté, par innocence…
    À dix-huit ans il voulut s’engager, crier par-dessus les barricades, porter des drapeaux, lever le poing, distribuer des tracts.
    À dix-neuf ans il alla de porte en porte, quémandant cette chose que l’on découvre dos aux casiers, à la sortie du lycée, au fond des bras, entre deux lèvres.
Dans cette frénésie d’essais et d’échecs il lui arriva de faire grand mal à ses proches, et si je ne demande pas pardon en son nom – puisque cela reviendrait à prendre piller davantage autrui – bien que cette lettre vous soit dédiée Madame, je vous prie, si l’occasion se présente au cours de votre interminable voyage, de bien vouloir passer mes plus sincères excuses, que je vous confie, à tous ceux et celles qu’il lui arriva de blesser.
    Aussi, il écrivit tout le long de ce périple, car il avait fait le choix des lettres. Les livres étant trop lourds, il n’en avait gardé que les feuilles, volantes, puis les phrases s’en détachèrent, il embrassa les mots, dansa avec les chansons, et traîna toutes ses langues en cerfs-volants sur la ligne du couchant. Parce qu’il fut rêveur aussi ! 
Un adolescent rêveur, si rêveur qu’il voulait concurrencer les Poètes (il était jaloux le bêta).
Il rêva d’histoires et de contes, de mondes extravagants, d’aventures palpitantes, de romans, d’épopées, de sagas et de théâtre ! Et le rêve le rattacha à la lignée des lettrés. Tout ce qu’il rencontrait dans ce Monde, il l’embellissait dans les siens, où il rêvait d’harmonie et de paix, de grands mots pour réconcilier les peuples, de combats contre l’injustice, d’heureuses communautés, de drapeaux et d’arc-en-ciel. 
Il rêva d’amour, de princes charmants, de beaux garçons, de Disney, des autres ados et de leur beauté je-m’en-foutiste qui transpire sur leurs nuques imberbes et ruissèle jusqu’à leurs reins. 
Or, en cherchant des princes dans un Monde sans fées, et qui ne peut que les inventer pour se consoler de ce qu’il est, il se perdit, il se perdit encore plus qu’il ne savait comment harmoniser le corps et l’esprit, le réel et la fiction, ne pouvant trouver la rime entre confiance, estime de soi, virilité, masculinité, homosexualité, féminité…
    Madame, demain j’aurais vingt ans !
    Le vécu s’est éparpillé sur mes joues, entre mes taches de rousseurs, et si je ne vous dirais comment j’ai réussi à réconcilier tout ce foutoir, je remercierai deux qualités qui me tirèrent d’affaire à chaque fois : une discipline, quoique étouffante, qui porta de nombreux fruits que je savoure encore aujourd’hui ; et, comme qui dirait, des étincelles de maturité, car quelque part, au fin fond de cette jeune cervelle anxieuse, une petite lueur tenta de la guider, de l’aider, de la prévenir, et il écouta ! Avec retard, mais au moins suivit-il ces bribes d’intuition. Le reste est mon œuvre et mon secret, à l’avenir de juger s’ils furent suffisants. 
    Adieu donc ! Enfance et Adolescence. Si je déplore que la rime ne se poursuive dans les âges à venir, j’appréhende les nouvelles consonances. Je fais mes adieux à ces deux-là que je fus, et que je suis encore, un petit peu, que je laisserai chahuter dans mon esprit, car si j’abandonne tout le mal du passé, nécessaire, mais présentement inutile, il faut toujours cueillir dans l’Enfance et l’Adolescence la tendresse première propre à chaque être humain, et de cela je fais une fleur que j’épingle sur mon sein. Ainsi, plus de rage, plus de honte, de peur, que Piaf prenne la parole, car investit du pouvoir conjugatoire, je sais dès maintenant ce que j’aurais fait et qu’il me reste à faire, ce que je n’aurais point regretté de faire mais que j’aurais regretté de n’avoir fait point :
    Madame, je sais que j’aurais écris, j’aurais lu et je me serais instruit dans toutes les matière et les quelques affaires qui importent dans ce Monde, car les Arts et les Lettres m’ont ravi l’esprit et je me suis donné à eux entièrement et sans réticences… avec mesure. J’ai passé bien trop de temps tapis entre des pages, entre des livres et des rayons de bibliothèque, tant d’années coincées à jamais entre les lignes, et bien qu’il s’agisse d’une activité louable, j’ai vingt ans, pardi ! Les livres attendront que j’atteigne la fleur de l’âge, mais tant que je bourgeonnerai, je ne m’enracinerai nulle part !
    Et c’est là mon autre vérité: il me faut courir. Je courrais il y a fort longtemps, et depuis je ne cours point, ne remue point, ne pipe ni mot ni pas, or le corps, autant que les langues, n’est fait pour l’inaction.  Plus jamais l’on m’enfermera ! Et je courrai dorénavant Madame, sans jamais m’arrêter, un pied sur la ligne du couchant, non en tentant d’atteindre les astres ni pour fuir mes arrières, non, mon mouvement ne sera ni fuite ni désir éternellement inassouvi ; mon mouvement n’aura eu d’autre but que lui-même, son être sera né de son action et son action lui aura donné raison d’être.
    Ainsi j’aurai couru, j’aurai nagé, j’aurai remonté le cours des langues à sens contraire, comme les saumons cherchant toujours à retrouver leur source… et moi aussi j’y serai revenu ; le sang sera retourné à la terre d’où il coula. J’aurai suivi la trace des drapeaux qui se fondent entre les aurores, j’aurai traversé les bois et les plaines que tant de peuples habitèrent, et j’aurai marché sur les noms plus anciens que les roches, sous la couronne des douze astres drapés dans l’azur, car Madame, le Vieux Continent m’appelle entre les fissures des vagues, et “je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps”.
    Mais dans cette quête aux drapeaux, il en est un qui m’aura toujours suivi, un qui m’a gonflé et brisé le cœur du même coup de foudre, un que j’aime par dessus tout, un que je servirai en bon soldat, car il celui en qui je dépose toute ma confiance, pour que ses six rayons me guident vers un autre… Oui Madame, j’aimerai un garçon. J’aimerai un garçon sans honte ni regrets, je l’aimerai à la folie, à la joie, à la tristesse, à la con, je l’aimerai comme seuls les imbéciles savent aimer, je l’aimerai jusqu’à ce que crèvent mes yeux et mes oreilles et ma poitrine et mes joues et tout mon être rougisse tant que le froid ne sera plus qu’une idée vague, je l’aimerai de tous les câlins que je m’interdit et qui s’empilent dans mon cœur, je l’aimerai entre les pages, entre les murs, entre les draps, de “bon matin” à “bonne nuit”, d’un “ça va ?” à l’autre, je l’aimerai dans la monotonie grisaillant et les hoquets du chagrin, je l’aimerai dans la science du mariage et dans l’art du couple, je l’aimerai jusqu’à brûler car pourquoi diable aurions-nous droit à ce verbe si douloureusement merveilleux si l’on ne l’use de tout son paradigme, de tous ses temps, de tous ses modes et de toutes ses personnes ?! J’aurai aimé un garçon, Madame, jusqu’à briser toutes les lois statistiques qui prédisent le malheur de “80% des hommes homosexuels sont à risque de…”, j’aurai aimé avec tous les risques et j’aurai aimé jusqu’à disloquer le mot aux maux sexuels pour qu’il n’en reste que des paillettes.
    Madame, aujourd’hui j’ai vingt ans !!!
    Il me plairait de vous dire Madame, que, dans cette première jeunesse qui s’ouvre à moi, je ne commettrais plus de fautes, que je deviendrais maître dans l’art d’anticiper la connerie, mais vous et moi savons que ce n’est pas le cas. 
    En matière de cas, personne ne sait comme le Destin se déclinera, et voyez que si les langues romanes ont la sagesse d’écrire le Passé à l’Imparfait, elles espèrent trop au point de décrire l’Avenir au Futur Simple. 
    Moi aussi, Madame, j’aimerai que le futur soit simple, 
    mais l’existence refuse qu’on la case dans un papier.
    Alors je LANCE cet avion,
    mes mots s’éteignent dans le calme du Demain,
    mes langues murmurent entre les astres,
    la terre ruissèle de mes souvenirs,


    Et dans la fraîcheur de la nuit noire, Madame,
Votre Élève rase les murs.


>> écouter : Meet me in the woods, Lord Huron.
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    Est l'Élève, pour vous servir. Étudiant en Littérature, je suivais les enseignements de Madame, professeur de Lettres, Arts et Philosophie, jusqu'à son départ…

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